Telle est, dans la 1ère lecture de ce dimanche (Gn 3, 9-15), la question posée par Dieu à Adam, après qu’avec Eve ils eurent mangé du fruit de l’arbre défendu. Au chapitre précédent (Gn 2, 16-17), le Seigneur Dieu avait pourtant donné à l’homme cet ordre : « Tu peux manger les fruits de tous les arbres du jardin ; mais l’arbre de la connaissance du bien et du mal, tu n’en mangeras pas. »
Mais le serpent a su attirer leur convoitise en leur laissant entendre qu’au contraire « Dieu sait que, le jour où vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront, et vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal. » (Gn 3, 5).
Ils se sont laissé prendre à la tentation d’assouvir leur désir par eux-mêmes. Certes, leurs yeux se sont ouverts, mais leur regard est complètement faussé : ils se sont éloignés de Dieu et n’ont expérimenté que le malheur.
Désormais, ils ont pris conscience de leur fragilité, ils vivent dans la peur de Dieu, et c’est pour cela qu’ils se cachent.
Le projet de Dieu est contrarié : l’homme n’aurait pas dû prendre conscience de cette manière-là de sa fragilité, il aurait dû pouvoir vivre sa condition dans la sérénité et non dans cette peur qui vient de s’emparer de lui. Ce qui est réconfortant, c’est que le mal ne vient pas de Dieu et qu’il ne fait pas non plus partie de la nature de l’homme. Quand l’humanité s’engage sur des fausses pistes, c’est parce qu’elle a été trompée, séduite. La lutte des prophètes, pendant toute la durée de l’histoire biblique, vise justement les innombrables séductions qui menacent l’homme. Tout n’est pas perdu, l’humanité aura le dessus, le mal n’aura pas le dernier mot.
Alors, cette question nous est aussi, et pleinement, adressée : où en sommes-nous de notre vie, de notre relation à Dieu et aux autres ? Qu’avons-nous fait des dons reçus de Dieu (rappelons-nous la parabole des talents) ? Dieu nous invite à faire la vérité, non pour nous accabler (rappelons-nous qu’Il veut notre bonheur) mais pour nous libérer, nous disposer à accueillir son amour infini. C’est un chemin de vie qu’Il nous propose. « Celui qui fait la volonté de Dieu, celui-là est pour moi un frère, une sœur, une mère » dit le Seigneur à la fin de l’Evangile de ce dimanche. Il fait apparaitre une nouvelle forme de famille, celle des disciples de Jésus, fondée non sur l’unité biologique ou affective de ses membres, mais sur l’orientation commune pour accomplir la volonté de Dieu. Car celui qui accueille le Père des cieux, comme son Père primordial, sera amené à revisiter les notions de famille, de frère, de sœur. Est-ce que les deux cercles s’excluent ? Non, Jésus invite tout un chacun à être fils et filles du Père, à vivre ce déplacement.
François Demaison, diacre permanent
Illustration Albrecht Dürer Adam et Éve 1504