Le rassemblement du FRAT de Lourdes des 10000 lycéens avait pour thème cette année : « quelle joie de te rencontrer ! » Les rencontres furent nombreuses… rencontre des jeunes entre eux, rencontre joyeuse de cette jeune Eglise ; rencontre des témoins dont l’expérience aidait chacun à comprendre combien les chemins de vie peuvent être riches et variés ; rencontre des malades. Mais comment ne pas oublier ces temps de célébration dans la basilique saint Pie X où ces 10000 jeunes faisaient l’expérience d’une alternance bien dosée de louange joyeuse et de prière silencieuse, de moments émouvants et de paroles fortes. Au cœur de cette foule, chacun redécouvrait la rencontre de l’ami intérieur, ce « demeurer avec Lui » dont beaucoup n’imaginent pas l’importance vitale. Beaucoup de doute ou d’apriori habitent le cœur des chrétiens quant à cette forme de prière silencieuse remise à l’occasion du FRAT au goût du jour. Intériorité rime souvent avec ennui. Or, comme le dit le cardinal de Lubac, « Ceux qui n’ont jamais vu la mer croient que rien n’est plus monotone, alors que rien n’est plus varié, rien ne réserve plus de surprises. Ainsi pour la vie intérieure et la contemplation de Dieu.»
Si nous abordons ce sujet, c’est bien parce le Christ attribue dans sa vie et dans son enseignement une place non négligeable à la prière intérieure, à cette relation intime avec son Père. Dans l’Evangile de ce dimanche, Jésus rappelle les conséquences de ce choix de vie : « Demeurez en moi, dit-il, comme moi en vous. De même que le sarment ne peut pas porter du fruit par lui-même, s’il ne demeure pas sur la vigne, de même vous non plus, si vous demeurez pas en moi. ». Autrement dit, comment porter beaucoup de fruits ? Comment faire en sorte que les projets et les décisions de chaque jour soient féconds ? Comment faire pour réussir pleinement sa vie ? Jésus répond au soir de son existence et nous livre un profond enseignement sur ce sujet : « sans moi, dit-il, vous ne pouvez rien faire ».
La bienheureuse Elisabeth de la Trinité, carmélite de Dijon, familière de la prière, voit cette Parole de Jésus comme l’invitation pour chacun à vivre à un certain degré de profondeur. C’est ce cœur à cœur avec le Seigneur, qui donne en Lui, d’être présent à tout et à tous. C’est sans doute ce qu’elle veut nous dire par ses mots : « Demeurez en moi. » C’est le Verbe (le Fils de Dieu) qui donne cet ordre, qui exprime cette volonté. Demeurer en moi, non par pour quelques instants, quelques heures qui doivent passer, mais « demeurer… » d’une façon permanente, habituelle. Demeurez en moi, priez en moi, adorez en moi, aimez en moi, souffrez en moi, travaillez, agissez en moi. Demeurez en moi pour vous présenter à toute personne ou à toute chose, pénétrez toujours plus avant en cette profondeur ».
Nous en faisons l’expérience, le monde semble parfois nous éloigner de cette profondeur et nous entrainer à vivre à la surface de nous-mêmes. Or, en nous invitant à demeurer en lui, le Christ ne nous arrache pas au monde, mais nous invite à croire qu’existe une fécondité à vivre cette intimité du cœur avec lui, à croire que dans cette profondeur se construit une communion inattendue avec tout homme.
Père Emmanuel Végnant
Ceux qui n’ont jamais vu la mer